.-Abdelghani AOUIFIA-.
Londres – Le premier ministre britannique, Keir Starmer, sera sur le pied de guerre cette semaine. Pour cause, le plan de relance économique de son gouvernement sera mis à rude épreuve à l’occasion de la présentation de sa déclaration de printemps.
L’exercice est certes coutumier. Mais cette année, il a l’allure d’heure de vérité pour le gouvernement travailliste. Le labour a vu ses efforts de redynamiser la croissance buter sur une léthargie têtue aggravée par une guerre commerciale qui s’annonce rude et sans merci.
Depuis la semaine dernière, les analyses fusent dans les grands tirages de la presse londonienne, brossant un tableau peu reluisant des perspectives économiques de la Grande-Bretagne.
C’est dans ce contexte compliqué que les yeux des Britanniques seront rivés mercredi vers le parlement de Westminster à Londres. Devant la chambre des Communes, la ministre des Finances, Rachel Reeves, présentera la déclaration de printemps détaillant les plans budgétaires et les perspectives économiques du pays.
L’intervention tant attendue de la Chancelière de l’Échiquier ne dérogera pas du cadre général ayant guidé l’action du gouvernement depuis l’arrivée au pouvoir du labour l’été dernier, à savoir la réduction des dépenses publiques.
Après les coupes de 2024, la locataire du 11 Downing Street devra présenter un nouveau plan de sabrer 10 milliards de livres Sterling.
Le montant devrait être utilisé, selon le Financial Times, pour combler un trou budgétaire causé par la croissance lente et les coûts galopants des emprunts publics.
Le Daily Telegraph rapporte, pour sa part, que Mme Reeves ordonnera des coupes supplémentaires de l’ordre de 2 milliards de livres par an dans la fonction publique. Une mesure qui, selon les syndicats, pourrait entraîner la suppression de dizaines de milliers d’emplois gouvernementaux.
En dépit de ces réductions successives, le gouvernement exclut tout retour aux années d’austérité, un des souvenirs pénibles du précédent gouvernement conservateur.
Le legs laissé par les Tories revient toujours dans le discours du labour pour justifier les drastiques mesures d’assainissement financier.
« Il n’est pas possible d’inverser en quelques mois plus d’une décennie de stagnation économique, mais nous apportons les changements nécessaires pour que la Grande-Bretagne se reconstruise à nouveau », a indiqué Mme Reeves dans des interviews diffusées dimanche.
L’incertitude internationale qui s’accentue avec la guerre commerciale internationale qui se profile à l’horizon est également avancée comme argument par le gouvernement Starmer.
« Le monde a changé et cela a un impact sur la croissance. On le constate dans tous les pays… mais devons-nous aller plus loin et plus vite pour accroître la croissance ? Oui », martèle l’argentière britannique. Elle promet que l’amère pilule des coupes budgétaires aura, in fine, pour effet d’améliorer l’économie et « mettre plus d’argent dans les poches des Britanniques ».
Par ailleurs, la déclaration de printemps de la ministre des Finances sera suivie, comme le veut la tradition politique britannique, par la publication des prévisions économiques et fiscales de l’Office de la responsabilité budgétaire (OBR).
La presse britannique a publié des extraits du rapport de cet organisme public, qui « portera un coup dur » au gouvernement Starmer, selon le Telegraph. D’après la publication, l’OBR devra sabrer de moitié ses prévisions de croissance du PIB britannique à 1% en 2025/26 contre une prévision initiale de 2%.
La prévision semble plausible d’autant que le PIB du pays s’est contracté de 0,1% en janvier dernier, alors que le gouvernement tablait sur une croissance de 0,1%.
Les coupes budgétaires et les opérations de dégraissage de la fonction avec la suppression massive d’emplois ont un coup politique énorme pour le labour, une formation de centre gauche, qui avait toujours placé la dimension sociale au cœur de son agenda politique.
La grogne augmente au sein du parti au pouvoir où des voix commencent à se faire entendre, tirant la sonnette d’alarme quant à la trajectoire du labour.
Dans l’aile gauchiste du labour, nombreux sont ceux qui s’inquiètent de la dégringolade de la popularité du parti qui a remporté les législatives de 2024 avec une large majorité de 174 voix, un score très proche de la victoire historique du labour sous Tony Blair en 1997.
Depuis, le Parti a perdu huit points dans les sondages, et la côte de popularité du Premier ministre a chuté de 22 points.
Peu de députés travaillistes estiment qu’il y a lieu de se réjouir, alors que les analystes n’écartent pas le spectre de rébellion au sein du parti aux commandes avec l’enlisement du ralentissement économique.
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