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Royaume-Uni : Les coupes budgétaires, l’amère pilule du Labour

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.-Abdelghani AOUIFIA-.

Londres – « Le monde a changé ! » C’est en ces termes que la ministre britannique des Finances, Rachel Reeves, a résumé la semaine dernière la situation dans laquelle se trouve le Royaume-Uni, avec des choix difficiles à faire pour remettre l’économie sur les rails.

Sabrer les dépenses publiques est la recette que le parti travailliste, qui dirige le gouvernement, applique pour tenir tête à une situation économique qui fluctue au gré des développements sur une scène internationale plus que jamais incertaine.

La décision est tombée mardi. Le gouvernement a annoncé des coupes de 5 milliards de livres Sterling par an dans les aides aux personnes handicapées ou malades, une question d’une grande sensibilité dans un pays dont le système de protection sociale est une fierté nationale. L’annonce, quoique largement attendue, a envoyé des ondes de choc, en particulier dans le camp travailliste.

La décision n’est que le prélude d’un vaste programme de réformes des aides sociales que le Labour, un parti de centre-gauche, entend mettre en œuvre pour assainir les finances publiques et donner à l’économie toutes les chances de rebondir après de longs mois de croissance pour le moins atone.

D’ailleurs, la Chancelière de l’Échiquier est attendue le 26 mars, quand elle présentera un discours sur les finances publiques.

La décision, qui a provoqué un large mécontentement parmi les électeurs, est justifiée, selon le gouvernement, qui juge « trop coûteux » et « insoutenable » l’actuel système de protection sociale du pays.

Les chiffres du bureau de la responsabilité budgétaire, qui contrôle les dépenses de l’État, semblent conforter le gouvernement dans son choix. Les dépenses des aides sociales ont totalisé 296,3 milliards de livres Sterling en 2023/24, soit 11% du Produit intérieur brut du Royaume-Uni.

L’argument économique avancé par le gouvernement pour justifier les coupes budgétaires dans un contexte difficile semble plausible, d’autant plus que l’économie britannique s’est contractée de 0,1% en janvier dernier, estiment les analystes de la City, quartier financier de Londres.

Cependant, la facture politique n’est pas à sous-estimer. Plusieurs députés travaillistes sont montés au créneau pour critiquer les coupes annoncées mardi.

Les critiques les plus acerbes proviennent de l’aile gauchiste du Labour. Le député Clive Lewis estime que les mesures prises par le gouvernement sont en contradiction avec les promesses du parti lors de la campagne pour les législatives de l’été 2024, remportées par les travaillistes avec une majorité confortable.

« Réduire les aides sociales de 5 milliards de livres sterling est une décision moralement fausse. Ce n’est pas ce que le parti travailliste devrait faire », indique, pour sa part, Brian Leishman, un autre député travailliste.

John Oxley, analyste politique et spécialiste des questions stratégiques, estime que les coupes budgétaires devront mettre le Premier ministre et chef du Labour, Keir Starmer, devant une sérieuse menace de rébellion de la part de députés consternés par la réforme du système de la protection sociale.

La manière dont le parti travailliste gère cela pourrait être cruciale pour la position à long terme de la formation, indique-t-il, avertissant qu’apaiser les rebelles pourrait être une tâche difficile.

L’analyste souligne que le domaine social demeure un terrain difficile dont la gestion pourrait être d’un coût électoral élevé pour le Labour, en particulier avec la montée en force de l’extrême droite, représentée par le parti de Reform.

Au milieu de ce débat politique, le spectre de Tony Blair, l’architecte du New Labour, hante la politique britannique. Ainsi, Stephen Bush, analyste du quotidien des milieux des affaires, Financial Times, relève les différences entre le Labour de Blair (1997/2007) et celui de Starmer.

Le parti travailliste est en train de vivre, sous Starmer, un « reset historique », estime l’analyste, rappelant que le New Labour de Blair avait doté cette formation d’un modèle de gouvernance social qui a maintenu le parti au pouvoir jusqu’à 2010.

Depuis lors, le parti est revenu aux méthodes privilégiées par son aille de droite pré-blairiste, indique l’analyste, soulignant que les coupes budgétaires controversées illustrent le clivage qui s’intensifie entre les deux courants.

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