L’UE et l’Afrique aspirent à un espace de ”prospérité partagée”

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Bruxelles – Les dirigeants de l’Union européenne et de l’Union africaine, réunis jeudi à Bruxelles pour leur sixième sommet, ont souligné leur volonté commune de réfléchir ensemble sur les moyens de construire un espace de prospérité partagée et de dessiner un avenir commun dans la ‘’cohérence, la solidarité et la coopération’’.

Les responsables européens et africains ont, tour à tour, passé en revue les principes directeurs et les domaines prioritaires qui doivent encadrer cette ‘’nouvelle ambition renouvelée’’ d’asseoir le partenariat euro-africain sur des paramètres ‘’clairs, efficaces et convenus’’ à l’’’horizon bien dégagé’’.

Lors de la séance inaugurale de ce Sommet, auquel le Maroc prend part avec une délégation conduite par le ministre des Affaires étrangères, de la Coopération africaine et des Marocains résidant à l’étranger, Nasser Bourita et composée notamment de la ministre de l’Économie et des Finances, Nadia Fettah Alaoui, le président du Conseil européen, Charles Michel a indiqué que ce sommet ‘’doit être l’étape où nous scellerons le renouvellement de notre relation stratégique’’.

‘’Nous sommes ici pour dessiner ensemble un espace commun de prospérité, de stabilité et de sécurité. Et nous souhaitons élaborer ensemble les principes fondateurs de ce pacte renouvelé : le respect mutuel et les intérêts partagés, d’égal à égal’’, a-t-il affirmé.

Mettant l’accent sur ‘’la nécessité absolue d’une Afrique stable, sûre et prospère’’, M. Michel a souligné que ‘’le financement des économies est dès lors une priorité pour nous. C’est pourquoi nous avons lancé le projet d’une réallocation partielle des droits de tirage spéciaux’’.

Il a également indiqué que l’UE est en train de mettre en place, avec les banques de développement, des mécanismes innovants de financement de projets et de couverture des risques avec l’objectif d’activer, de démultiplier et canaliser plus efficacement l’argent privé vers les projets d’investissement.

Le président du Conseil européen a, par ailleurs, mis l’accent sur la nécessité de bien gérer ‘’la mobilité des personnes, à l’intérieur du continent africain comme vers l’Europe, en luttant contre les trafics et la migration irrégulière et en mettant en place des canaux légaux de migration’’.

Pour sa part, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a souligné que l’Europe partage la même vision avec l’Afrique, celle de vouloir créer la stabilité, la prospérité et le dynamisme économique et social, notant que ce sommet ‘’est l’occasion rêvée d’échanger sur la manière dont nous allons travailler ensemble, sur la manière dont nous concrétisons nos ambitions communes’’.

Elle a mis l’accent sur la stratégie Global Gateway qui vise à développer des liens intelligents, propres et sûrs dans les domaines du numérique, de l’énergie et des transports et à renforcer les systèmes de santé, d’éducation et de recherche qui pourrait profiter amplement au continent africain.

Pour la cheffe de l’Exécutif européen, il s’agit d’une stratégie d’investissement dans les infrastructures et dans les personnes.

‘’Nous voulons faire de Global Gateway une marque de confiance dans le monde entier. Cette stratégie mobilisera la puissance de l’Europe pour débloquer des niveaux d’investissements sans précédent, non seulement publics mais aussi privés. Nous pouvons nous attendre à un paquet d’au moins 150 milliards d’euros pour l’Afrique pour les sept prochaines années. Il s’agit du premier paquet dans le cadre de notre stratégie de passerelle mondiale’’, a-t-elle ajouté.
Pour le Président français Emmanuel Macron, dont le pays assure la présidence tournante de l’UE, le moment est venu pour l’Europe de bâtir une nouvelle alliance avec l’Afrique.

‘’Le moment est de savoir si nous, Européens, bâtissons une nouvelle alliance unique, conscients que la réussite ne peut être que commune. S’il y a un échec du continent africain, le premier à en pâtir sera le continent européen. Alors bâtissons !’’, a-t-il dit.

Evoquant l’étape post pandémique, le président français a affirmé que l’Europe œuvrera pour développer l’autonomie de l’Afrique, notamment en matière des vaccins.

‘’L’Europe est le continent qui a le plus donné et exporté de vaccins vers l’Afrique. Maintenant, nous allons œuvrer au développement d’une autonomie sur le continent africain’’, a-t-il affirmé.

Le président sénégalais et président en exercice de l’Union africaine, Macky Sall, a souligné, de son côté, qu’avec l’Europe, l’Afrique souhaite convenir d’un partenariat ‘’repensé, rénové et refondé’’.

‘’Plus qu’une mise à jour, nous proposons d’installer un nouveau logiciel adapté aux mutations en cours et apte à soutenir la dynamique novatrice que nous voulons imprimer à nos relations’’, a-t-dit, relevant qu’’’à l’ère des complémentarités et des interdépendances, nous avons tous besoin les uns des autres’’.

C’est dire que l’Afrique ne peut se satisfaire de la promesse du continent du futur, a insisté M. Macky Sall.

‘’Entre l’Europe et l’Afrique, il y a la marque de la pesanteur de l’histoire et une proximité géographique étroite, le brassage humain qui a fécondé des affinités socio culturelles et linguistiques. Une coopération ancienne intense et diverse. C’est ce qui marque la particularité et la complexité de notre histoire’’, a-t-il rappelé.

Notant que l’Afrique est en pleine mutation, le président de l’UA a affirmé que ‘’le continent veut des partenariats consensuels et mutuellement bénéfiques, des partenariats co-construits sur le fondement des priorités et des valeurs partagées sans injonction civilisationnelle. Sans exclusion, ni exclusivité’’.

‘’L’Afrique, qui a suffisamment porté le poids de l’histoire, entend enfin se libérer de son fardeau pour être acceptée et respectée comme partie prenante de nouvelles dynamiques qui régissent la dynamique mondiale et forgent le destin commun de l’humanité’’, a-t-il ajouté.

Le Président de la Commission de l’UA, Moussa Faki Mahamat, a fait observer, quant à lui, que ‘’le nœud n’est pas la disponibilité de financements, mais le rassemblement des volontés politiques garantissant les meilleures affectations et surtout un système d’une gouvernance juste et solidaire’’.

Il faut aller au-delà de la simple formulation théorique des priorités (de la coopération commune), a-t-il relevé, estimant que ‘’la convergence euro africaine pèche par un décalage entre la formulation discursive et ses retombées factuelles pratiques transformatrices’’.

‘’La lisibilité du partenariat ne peut être reflétée que par des résultats tangibles, ce qui interpelle notre réflexion commune’’, a-t-il dit, ajoutant que ‘’les mécanismes classiques ayant affiché leurs limites, nous sommes sollicités à en inventer de nouveaux plus souples, plus efficaces et plus producteurs de résultats.’’

Le sommet UE-UA est organisé autour de tables rondes thématiques articulées sur le financement de la croissance, les systèmes de santé et production de vaccins, l’agriculture et le développement durable, l’Éducation, la culture et la formation professionnelle, la migration et la mobilité, le soutien au secteur privé, l’intégration économique et la Paix, la sécurité et la gouvernance, et enfin le changement climatique et la transition énergétique, la connectivité et l’infrastructure numériques et en matière de transports.

Une déclaration conjointe sur une vision commune pour 2030 devrait être adoptée à l’issue de ce sommet.